SIHH : Cartier, gardien de l’élégance horlogère
Il y a le SIHH et il y a Cartier. La marque occupe à elle seule près de la moitié du Salon International de la Haute Horlogerie (SIHH), au même titre qu’elle génère à elle seule près de la moitié des revenus horlogers de son propriétaire, le groupe Richemont. Mais le tout n’est pas d’occuper le devant de la scène, encore faut-il l’assumer. Et à cet exercice, Cartier brille avec une insolente constance.
Ci-dessus, la Cartier Clé au poignet
La Clé du style Cartier
L’édition 2015 de ses collections ne faillira pas à la tradition. Créativité, authenticité, une invariable élégance, le « style Cartier » se porte mieux que jamais. Il s’incarne aujourd’hui par une toute nouvelle ligne, la « Clé de Cartier ».
La collection, qui sera disponible à partir du mois d’avril est dans le plus pur esprit de la maison, avec, certes, un cadran rond, mais une carrure qui se rapproche de celle de la Tortue. On y retrouve tous les attributs essentiels Cartier (cote occasion Cartier): cadran guilloché, larges chiffres romains, aiguilles et index bleus. La pièce s’étire en trois dimensions, 31 mm, 35 mm et 40 mm. Il peut donc s’agir, au moins pour les deux dernières, de pièces unisexes. La modèle or rose de 40 mm sera proposée à 13 000 euros. Toutes seront motorisées par un nouveau calibre automatique maison, le 1847 MC, comme l’année de création de la maison.
L’élément distinctif de cette Clé, outre son design subtil et harmonieux, est sa couronne. La seule question est : peut-on encore l’appeler « couronne » ? Pour des raisons de compréhension, oui. Toutefois, l’objet n’a plus réellement l’apparence d’une « couronne », n’étant plus ronde. Cartier lui a substitué une forme trapézoïdale, incurvée, qui vient épouser les contours de la boîte. Le composant doit donc être préalablement désengagé de son emplacement pour pouvoir être tourné dans un sens ou dans l’autre. La création peut sembler mineure mais rarissimes étaient les marques, jusqu’à présent, à modifier cette couronne dont la forme ronde semblait gravée dans le marbre.
Ci-dessus, la Cartier Clé pavé de diamant
Grandes et petites complications à l’honneur
Sur les autre annonces que Cartier vient d'effectuer au SIHH, trois grandes nouveautés sortent particulièrement du lot. Sans surprise, il s'agit des complications les plus remarquables de la manufacture.
La première n'est d'ailleurs pas une complication mais une grande complication - du moins au sens genevois, voire de Cartier, car le pièce n'en comporte que deux, lorsque trois sont requises en Vallée de Joux pour devenir une "Grande Complication" à proprement parler.
La pièce se nomme sobrement "Rotonde de Cartier Grande Complication". Elle embarque une répétition minute et un quantième perpétuel, régulés par un tourbillon volant. Sans s'adonner au même exercice que Piaget, la maison annonce néanmoins une épaisseur limitée à 5,49 mm, une mensuration particulièrement fine pour ce type de construction.
La pièce est de style très classique. C'est là le dessein de Cartier : "cela faisait partie du brief lorsque nous avons commencé à réfléchir à la pièce il y a cinq ans", souligne Carole Kasapi, responsable du développement des mouvements de haute horlogerie chez Cartier. La Grande Complication ne se targue donc d'aucune innovation majeure mais d'un style et d'une construction dans la veine la plus noble de la haute horlogerie classique. De la disposition des complications, à trois compteurs, jusqu'à une boîte en platine, "nous n'avons rien inventé", confesse Carole Kasapi. Rien, si ce n'est le mouvement en lui-même, car Cartier reste en termes de développement une jeune manufacture de moins de 10 ans, et ce type de réalisation reste un exercice périlleux lorsque l'on part d'une feuille blanche.
Ci-dessus, la Cartier Rotonde Grande Complication en Platine
Exercice réussi ? Assurément. Si l'on peut rester réservé sur la construction squelette de la pièce, une mode à laquelle Cartier souscrit avec brio mais qui n'en reste pas moins une mode, la pièce convainc par ses dimensions, son harmonie et la douceur de sa répétition minute. L'ensemble sera certifié Poinçon de Genève, un atout de charme pour la finition de cette Grande Complication.
Le calibre 9406 MC qui la propulse compte plus de 500 composants et développe 50 heures de réserve de marche grâce à son barillet alimenté par micro-rotor. Elle sera proposée à 520 000 euros HT en platine, 620 000 euros HT en version sertie, toutes deux de 45 mm.
Ci-dessus, le calibre 9406 MC de la Rotonde Grande Complication
Dans la catégorie « complications horlogères », un Double Tourbillon Mystérieux prend sa suite. Son principe : une cage de tourbillon montée sur un disque saphir, sans aucune connexion visible avec la boîte ni le mouvement. Cage et tourbillon tournent pour la première en cinq minutes, pour le second en une minute, d’où l’appellation « Double Tourbillon » - quelque peu abusive, laissant penser que deux tourbillons sont présents, alors qu’il s’agit d’un unique tourbillon effectuant deux rotations simultanées à des vitesses différentes. La pièce entre en collection de manière permanente, avec une version en or rose à 110 000 euros HT.
Ci-dessus, Cartier Double Tourbillon Mysterieux
Et pour les bourses plus modestes...
Deux autres modèles ferment la marche de ce SIHH. Le premier est l’iconique Tank. On la retrouve dans une version Squelette Saphir déjà connue, mais son cadran – ou plutôt ce qu’il en reste dans cette version squelette – est aujourd’hui traité en couleur dorée, en maillechort. La pièce de 30 x 39 mm se positionne à seulement 33 500 euros HT avec boîte en or rose. Cette nouvelle finition aux tons or offre une alternative intéressante aux tons gris précédents, classieux mais très froids.
Cartier Tank Squelette
Mechanical Legends, une nouvelle collection
Cartier ouvre durant ce SIHH une nouvelle collection de pièces, destinée à faire revivre ses modèles de légende. De prime abord, on pourrait rester sceptique envers cet exercice d'auto-satisfaction rétro. Pourtant, lorsque l'on voit la pièce remise à l'honneur, on s'avoue conquis : la Crash de 1967.
Dans ce garde-temps créé en 1967, Cartier explosait littéralement les conventions esthétiques de l'époque en créant une montre au dessin destructuré, captivant, comme bousculé par un accident stylistique. En 2015, Cartier reprend sa copie et y intègre un mouvement maison revu et ajouré pour parfaitement s’intégrer dans une boîte au passage élargie quelques millimètres. Le résultat reste, 45 ans plus tard, toujours aussi troublant et envoutant. Deux versions seront proposées, standard et sertie. La collection sera limitée à 67 exemplaires.
Olivier Müller
Ci-dessus, le mouvement de la nouvelle Crash de Cartier
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