Bucherer : Le Watch megastore

Il aura fallu un an et demi pour que Bucherer investisse la capitale. Reprenant les locaux de Old England, ravagé par un incendie au moment de son départ, le groupe Richemont s’est porté acquéreur de cet emplacement unique pour en confier la gestion à Bucherer, qui le loue et l’exploite. « C’est un monument historique dont la restauration fût soumise à de nombreux contrôles », indique un porte-parole Bucherer en faisant allusion à l’imposante façade du bâtiment, d’architecture commune avec l’hôtel Intercontinental.

Au total, ce sont 23 marques qui se déploient sur 2200 m², sur trois étages. C’est à l’occasion de l’ouverture de cette immense espace que le groupe Bucherer a pris pied en France. « Nous avons ouvert un bureau à Paris au mois de juillet 2012 » précise le groupe. « 120 personnes en sont salariées, dont 60 rien que sur le point de vente ». 

Le recrutement de cette force de vente a soulevé bien des questions parmi les professionnels du luxe alentours. Si le groupe Bucherer affirme « avoir reçu de très nombreuses candidatures » il n’en demeure pas moins que recruter plusieurs dizaines de vendeurs qualifiés est un exercice difficile pour plusieurs raisons.

La première est la diversité des langues dans lesquelles opérer. Ainsi, une dizaine de langues seront parlées boulevard des Italiens et trouver autant de personnel ainsi qualifié est un exercice difficile pour lequel un cabinet de chasseurs de tête fut spécialement mandaté.

La deuxième difficulté réside dans le tacite « accord Vendôme » selon lequel le débauchage entre marques est désavoué. C’est notamment la raison pour laquelle plusieurs des vendeurs Bucherer viennent d’univers non horloger : tourisme, hôtellerie, etc. On retrouve notamment de nombreuses personnes issues des grands magasins type Printemps. « Nos formateurs sont venus du siège en Suisse spécialement pour former ces équipes » souligne un porte-parole du groupe.

Pour réussir à agencer ces 23 marques entre elles, esthétiquement mais aussi diplomatiquement, l’opérateur Bucherer a imposé sa ligne de conduite à tout le monde. Au plan esthétique, par exemple, chaque marque est tenue de respecter en façade le code couleur cuivre et laiton défini par Bucherer, tout en conservant une relative marge de créativité au sein de son espace. 

Le choix des pièces disponibles fût également un exercice difficile. Certaines marques comme Vacheron Constantin, Panerai et bien d’autres encore comptent sur quelques dizaines de mètres à peine trois espaces à approvisionner : un point de vente au détail, une boutique de marque et, maintenant, le megastore Bucherer. Le groupe souligne pour autant n’avoir eu « aucune difficulté dans le choix des pièces, en raison de la forte adhésion des marques au projet ». Si le magasin souligne même « attendre des pièces exclusives que l’on ne trouvera que chez Bucherer», certaines enseignes à la production contenue pourraient éprouver des difficultés à livrer des pièces rares ou en séries confidentielles. Dès lors, il va falloir arbitrer : où livrer les deux exemplaires réservés à la France de telle série limitée de telle marque ? Au meilleur détaillant, au magasin de marque, ou chez Bucherer ?

Quoiqu’il en soit, cette 25^ème enseigne Bucherer, la plus importante au monde, semble promise à un succès certain  pour deux raisons : la première est naturellement sa position stratégique entre Vendôme, Opéra et Concorde. C’est un axe incontournable pour la clientèle touristique dans une ville comme Paris où 50% des achats horlogers sont effectués par des touristes. La seconde raison tient simplement à l’expérience éprouvée de Bucherer en tant qu’opérateur d’univers multimarques de ce type, métier qui est, selon différentes sources, l’activité qui fournit la plus importante partie des revenus de Bucherer.

Olivier Müller

Visuels © Delos Communications, Bucherer